186 organisations demandant aux dirigeant·es de l'UE de changer de cap et de mettre fin à la guerre contre les personnes exilées

En octobre 2024, plus de 70 organisations constituées de personnes exilées et de personnes racisées ainsi que 140 de leurs soutiens ont écrit aux institutions de l’UE pour demander des alternatives au régime mortel des frontières de l’UE. À la suite de nouveaux reculs en matière de droit d’asile, d’annonces législatives concernant les mesures d’expulsion, et face à l’accélération d’un tournant fasciste à travers le monde, nous réitérons notre appel aux dirigeant·es de l’UE à changer de cap et mettre fin à leur guerre contre les personnes exilées. 

Les attaques contre les droits des personnes exilées sont le début d’attaques contre tout le monde. Les politiques anti-migration et la dégradation des droits qui en découle ont ouvert la voie à des reculs en matière de droits des femmes et du droit à l’avortement, à des mouvements anti-genre, anti-jeunes, anti-ouvriers et à la répression généralisée des libertés civiles. L’impact sur les communautés exposées à la violence d’État est disproportionné, notamment pour les personnes pauvres, les personnes exilées, les personnes sans-papiers, les femmes, les personnes racisées, la communauté LGBTQIA+, les personnes transgenres, les jeunes et les travailleur·ses du sexe. 

Nous, organisations constituées de personnes exilées et de personnes racisées, ainsi que nos soutiens, réitérons notre appel aux dirigeant·es européen·nes à condamner le tournant violent, punitif et immoral qu’ont pris les politiques migratoires européennes au cours des dernières semaines. 

Ces derniers mois, nous avons assisté à l’accélération d’un tournant fasciste mondial. La victoire de Trump aux États-Unis et la percée électorale de l’extrême droite en Allemagne légitiment encore davantage les récits de haine et les politiques d’exclusion dans le monde entier. En imposant leur programme raciste et impérialiste, les forces d’extrême droite normalisent les attaques contre les personnes exilées et racisées, y compris dans les pays dirigés par des gouvernements prétendument centristes. Ces dynamiques favorisent l’érosion du droit international et de la protection des droits humains.  

En Europe, nous constatons déjà que les droits des demandeur·esses d’asile sont gravement lésés. Qu’il s’agisse de la suspension du droit d’asile en Pologne, des projets autrichiens visant à mettre un terme aux regroupements familiaux pour les réfugié·es, de la réintroduction par l’Allemagne de la carte de paiement pour les demandeur·esses d’asile, de la tentative italienne de traitement offshore des demandes d’asile ou du gel précipité des demandes d’asile syriennes dans plusieurs pays, les gouvernements européens ont atteint un point de non-retour.

La diabolisation et la criminalisation de nos communautés s’incarnent également dans les projets visant à faciliter l’expulsion des personnes exilées. Le nouveau centre d’expulsion de l’Allemagne pour les demandeur·esses d’asile à la frontière avec la Pologne, ainsi que son programme pilote de transfert de réfugié·es vers la Grèce, de même que la proposition des Pays-Bas d’envoyer les personnes déboutées de l’asile en Ouganda, ne sont qu’un aperçu de la stratégie plus large de l’UE visant à accélérer le refoulement des personnes exilées. 

Le 11 mars, l’UE a annoncé une nouvelle proposition juridique dite « règlement retour ». Celle-ci n’est autre qu’un complément à l’approche inhumaine et punitive de l’Europe forteresse. Sous couvert d’« efficacité » et d’« innovation », elle propose une nouvelle approche insidieuse qui renforce le profilage racial et la surveillance pour « détecter » les personnes exilées, encourage les centres de détention délocalisés et autorise même le placement d’enfants en détention. 

L’UE ne se contente pas de déclarer la guerre aux personnes exilées à l’intérieur de ses frontières, elle transforme également les pays voisins, tels que la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, la Tunisie, la Libye, l’Égypte et le Maroc, en une nouvelle ligne de front, avec des conséquences dévastatrices pour celles et ceux qui recherchent la sécurité et pour les personnes qui font preuve de solidarité. Par exemple, le gouvernement tunisien, soutenu par le financement de l’UE sous couvert de contrôle des migrations et de développement économique, a intensifié sa répression, ciblant non seulement les personnes exilées et les personnes en déplacement, mais aussi celles et ceux qui osent les aider. Des activistes, des travailleur·ses humanitaires et même des citoyen·nes ordinaires qui offrent de l’aide et dénoncent le racisme sont emprisonnés et accusés de trahison et de conspiration contre la sécurité de l’État.

Cette criminalisation de la solidarité reflète l’hostilité croissante de l’UE à l’égard de l’action humanitaire. Les États membres vilipendent et entravent celles et ceux qui remettent en cause leurs politiques inhumaines – tout en soutenant les gouvernements autoritaires dans cette démarche. La nouvelle directive « relative l’aide à l’entrée, au transit et au séjour non autorisés » de l’UE présenté en novembre 2023 criminalise encore davantage la migration et les actes de solidarité. Ainsi, elle utilise la lutte contre les passeurs comme prétexte pour accroître les pouvoirs de la police et mettre en place des lois punitives qui ciblent les personnes exilées et les acteur·rices humanitaires. 

D’une manière générale, les États membres répriment et surveillent de plus en plus les militant·es qui font preuve de solidarité. Récemment, l’Allemagne a utilisé les lois sur l’immigration pour ordonner l’expulsion de trois citoyen·nes européen·nes et d’un citoyen américain en raison de leurs actions présumées lors de manifestations propalestiniennes et contre le génocide. La brutalité policière s’intensifie également lors des manifestations, et des menaces pèsent sur le droit à la liberté de réunion pacifique dans toute l’Europe. Ces attaques contre celles et ceux qui s’organisent sont facilitées par l’augmentation des dépenses consacrées aux infrastructures de maintien de l’ordre, notamment aux outils de surveillance et aux outils numériques.

Au lieu de gaspiller des milliards dans de nouveaux centres de détention offshore, des procédures d’expulsion illégales et coûteuses, et la militarisation des frontières, les dirigeant·es européen·nes pourraient mettre en œuvre des politiques conformes aux droits humains, au bien-être économique, à la sécurité et à la protection des communautés, et investir dans des solutions à long terme pour lutter contre la dégradation du climat, les conflits et le déclin économique.

Nous réitérons notre appel aux dirigeant·es à changer de cap et à proposer une alternative forte à la politique migratoire actuelle de l’UE, qui est illégale, immorale et inapplicable.

Nous demandons :

– Des itinéraires sûrs et légaux pour les personnes exilées, les demandeur·esses d’asile et les réfugié·es ;

– Des voies de régularisation et la fin de la criminalisation des personnes en déplacement ;

– De s’attaquer aux causes profondes qui poussent les gens à fuir leur pays, notamment en mettant fin aux investissements de l’UE dans la militarisation et la sécurisation des frontières, le commerce des armes, les combustibles fossiles et les autres stratégies industrielles contribuant aux conflits et à la dégradation du climat dans les pays du Sud ;

– De développer des politiques et redistribuer les ressources pour répondre aux besoins de toutes les personnes (y compris les personnes exilées, travailleur·se·s ubérisé·e·s, les aidant·e·s non rémunéré·e·s et les travailleur·se·s précaires) au lieu de donner la priorité aux profits des entreprises ;

– Une stratégie économique et sociale globale pour toutes les personnes qui vivent en Europe.

Nous appelons les dirigeant·es européen·nes à changer de cap et à mettre fin à leur guerre contre les personnes exilées. Nous les invitons à la place à réorienter leurs politiques pour mettre l’accent sur une politique de soin, de protection et de sécurité pour tout·e·s, y compris les personnes exilées.

Signatories

  1. Equinox Initiative for Racial Justice
  2. International Women* Space
  3. Greek Forum of Migrants
  4. #DiasporaVote!
  5. ACAT Belgium
  6. Africa Advocacy Foundation (Mi-HealthEurope)
  7. Afrosocially
  8. AlgoRace
  9. All African Women’s Group
  10. All Faiths and None
  11. Anti-Racist Forum ry
  12. Antizionist Jewish Alliance in Belgium
  13. Apna Haq
  14. APROSEX
  15. ASAMBLEA PLAZA DE LOS PUEBLOS
  16. Asociación Por Ti Mujer
  17. Association Tunisienne des Femmes Democrates
  18. Avocats Sans Frontières
  19. BARAC UK
  20. Chaska asbl
  21. Chkoun Collective
  22. Climate justice Berlin kollektiv
  23. Collectif des Femmes
  24. Comitato 3 Ottobre
  25. Dalla Parte Giusta della Storia
  26. DeZIM
  27. Diaspora Climate Platform
  28. Documatism
  29. European Network against Racism
  30. European Sex Workers Rights Alliance
  31. Feminist Collective of Romani Gender Experts
  32. Feministas en Holanda
  33. Flüchtlingshilfe Iran e.V
  34. Garaldea Ecofeminista
  35. Glitch
  36. Global Asylum Seeker Human Rights Defenders Committee (GASHDC)
  37. Global Women Against Deportations
  38. Greek Forum of Refugees
  39. Hidden Goddess
  40. Humanity Diaspo ONG
  41. Infokolpa
  42. International Civil Society Working Group for the PFPAD
  43. International Coalition for People of African Descent ICPAD
  44. Kopanang Africa Against Xenophobia (KAAX)
  45. Migrant Tales
  46. Migrationsrat Berlin e.V.
  47. Missing Voices (REER)
  48. Mouvement Uplited Africa -MUA
  49. Movement of Asylum Seekers in Ireland
  50. New Horizons Project
  51. New Women Connectors
  52. Northern Ireland Council for Racial Equality
  53. Pacific Migration Partners
  54. Racism and Technology Center
  55. Refugiados Bienvenidos España
  56. Revibra Europe
  57. Romanian Women’s Association in Italy (Associazione Donne Romene in Italia – ADRI)
  58. Romnja Feminist Library
  59. Siempre ong
  60. Sobre los Margenes
  61. Soectrum
  62. SOEPIC
  63. SOS Racismo
  64. Sos Racismo Madrid
  65. Space2Grow
  66. TAMPEP Network
  67. The Channel Monitoring Project
  68. UNESCO IPL- People of African Descent & the SDGs E-Team
  69. VERVERIPEN
  70. We Are Monitoring Association
  71. WIDE+ Gender and Migration Working Group
  72. Women of Colour in the Global Women’s Strike
 
Supporters
  1. Abolish Frontex
  2. Abolish Frontex Belgium
  3. Academics for Peace-Germany
  4. Access Now
  5. Agora Association
  6. Ariadni Lesvos
  7. Aspiration
  8. Avocats Sans Frontières
  9. BIDs Belgium
  10. borderline-europe – Human Rights without borders e.V.
  11. Catalyst Institution of Arts and Technology
  12. Center for Legal Aid “Voice in Bulgaria”
  13. Centre for Peace Studies
  14. CITAD
  15. Collective Against Environmental Racism (CAER)
  16. Comisión Legal Sol
  17. Coordinadora Obrim Fronteres
  18. Dreaming Beyond AI
  19. EAPN – European Anti-Poverty Network
  20. Egala
  21. Equal Legal Aid
  22. Equinet
  23. European Alternatives
  24. European Center for Constitutional and Human Rights (ECCHR)
  25. European Civic Forum
  26. Flüchtlingshilfe Iran e.V
  27. Flüchtlingsrat Niedersachsen
  28. Flüchtlingsrat Schleswig-Holstein
  29. forRefugees
  30. Fundacja Inicjatywa Dom Otwarty
  31. Global Alliance Against Traffic in Women
  32. Guerrilla Foundation
  33. Hoffnung leben e.V.
  34. ILGA Portugal
  35. Infokolpa
  36. InterAlia
  37. InterEuropean Human Aid Association 
  38. Kif Kif vzw
  39. KISA – Action for Equality, Support, Antiracism
  40. KOK German NGO Network against Trafficking in Human Beings
  41. La Cimade
  42. Life Quality Improvement Organisation FLIGHT
  43. Louise Michel
  44. Migrant Tales
  45. Migration Consortium
  46. Mobile Info Team
  47. Network for Children’s Rights
  48. No Name Kitchen
  49. Nomada Association
  50. Ocalenie Foundation
  51. Panoptykon Foundation
  52. Podróżnych Ugościć
  53. Polish Migration Forum Foundation
  54. Pour la Solidarité 
  55. Queerowy Maj (Queer Maj)
  56. ReFOCUS Media Labs
  57. Refugee Legal Support (RLS)
  58. Samos Volunteers
  59. SCI Catalunya
  60. Sea-Watch
  61. SOLIDAR
  62. Solidary Wheels
  63. Steunpunt Asielzoekers Lubbeek
  64. STOWARZYSZENIE EGALA
  65. Students for Palestine Finland
  66. TAMPEP, European Network for the Promotion of Rights among Migrant Sex Workers
  67. To Proste Foundation
  68. Transitional Justice Institute
  69. Transnational Institute
  70. Über den Tellerrand e.V.
  71. URGG
  72. We Are Community
  73. WeMove Europe
  74. Women Against Fascism
  75. Women Against Violence Europe
  76. Yoga and Sport with Refugees
  77. Alexandra Keiner 
  78. Alyna Smith
  79. Andrea Soler 
  80. Andreas Beyer Gregersen
  81. Angeliki Polatidou
  82. Ann Singleton
  83. Anna Troeng
  84. Barbara Pomfret
  85. Cecilia Wachter
  86. Clementine Zill
  87. Denisse Vasconez
  88. Dorrie Wilson
  89. Erika Piazza
  90. Francesca Spinelli
  91. Gisela Murillo Guinart
  92. Ilaria Aversa
  93. Ioana Turcan
  94. Jasmina Al-Qaisi
  95. Josefine Laule
  96. Joseph-Éléazar Duhot
  97. Juliette Goulet
  98. Klara Körbi
  99. Kloé Marin
  100. Kristiāna Bruce
  101. Lea Höppner
  102. Leïla Dimou
  103. Leticia García Fons
  104. Lisa-Marlen Gronemeier
  105. Lucy Alice Thomas
  106. Marga Burgui Artajo
  107. Maria Pisto
  108. Marina Pico Cabiro
  109. Marlene Scholkmann
  110. Nidzara Ahmetasevic
  111. Peter Ebbinghaus
  112. Sarah Diedro Jordão
  113. Theresa Klettke
  114. Viliam Matomäki
  115. Zina Weisner